~~ Mauvaise foi – Cette pseudo maladie de l’esprit se diagnostique quand une personne assène ses certitudes en sachant qu’elles sont fausses, quand elle est en conflit permanent avec autrui, quand son complexe de supériorité lui fait constamment provoquer des altercations dans le but de pourrir les conversations. C’est quelqu’un qui commence souvent un entretien par ces mots : « Je vais te dire quelque chose, mais surtout, ne te fâche pas ! », sachant très bien que ses propos vont blesser, qu’ils vont briser les reins des auditeurs, souvent choisis parmi ceux qui sont en état d’infériorité. C’est quelqu’un qui est imbu de sa personne, qui tend à dominer et dont les propos sont déraisonnables. L’homme de mauvaise foi est en mauvais termes avec ses voisins et avec sa famille ; il a peu ou pas d’amis véritables ; il reçoit peu ; il est sectaire. C’est une sorte de pater familias qui gouverne son petit univers sans se préoccuper des heurs et malheurs du monde. Il n’accepte aucun compromis. Il est agressif, querelleur, belliqueux ; c’est un démolisseur. Là où il sévit, l’amitié ne repousse pas ! Étienne Parize
~~C’est une petite chose, un mot, une tentative de déstabilisation, un mensonge – le plus souvent – qui gonfle comme un ballon de baudruche, comme le membre minuscule qui se prend une érection. Cela commence à peine comme le battement d’ailes d’un papillon et finit comme le bruit de dix mille bouches qui prononceraient en même temps le même mensonge. Cela devient un fleuve torrentueux qu’on ne peut arrêter ; comme la bouche d’un volcan inextinguible, toutes proportions gardées. Quand on est la victime d’une telle machination, l’on est le spectateur médusé, l’auditeur interloqué de sa propre dévalorisation ; dans ce cas précis, on pourrait presque affirmer qu’il s’agit d’une diffamation. Deux ou trois langues vipérines ont murmuré dans le pavillon de deux ou trois oreilles attentives que celui-là « a ses humeurs, qu’il est en quelque sorte caractériel, que sa famille est bizarre… », toutes ces paroles prononcées avec conviction, mais dans la seule intention de faire le mal et de nuire, les affirmations péremptoires étant fausses, naturellement. Le papillon s’est envolé, et le courant d’air produit s’est mis à gonfler, gonfler, gonfler. Tout le village inhale maintenant l’air vicié que deux ou trois bouches malfaisantes exhalent, jubilant de produire un tel effet.
~~Dans ce monde de guérillas urbaines, de corruptions, de mécontentements divers et variés, de guerres, de maladies, d’erreurs, d’abus, de pillages, d’égoïsmes, de chômage, de manifestations, d’extrémismes violents, de révolutions, de grèves, de mensonges, de délinquance, de terrorisme, d’enlèvements, de rançons, etc., etc., j’ai l’audace de vous présenter mes meilleurs vœux pour 2015. Que votre courage soit maximal pour affronter ce qui vous attend ! Ne désespérez pas, quelques îlots de bonnes et douces choses demeurent : l’amitié, l’art, la beauté… et si la santé les accompagne, il n’y a pas lieu de sombrer dans la mélancolie ! Bonne et heureuse année. Étienne
Concert –Il est entre quatre heures et demie et cinq heures du matin. Je suis assis dans mon lit, en train de déguster tranquillement le calme semi nocturne ; le jour point déjà timidement : c’est l’aurore ; une lueur incertaine frappe aux fenêtres, puis entre délicatement dans ma chambre, laquelle est démunie de volets depuis que je m’y suis installé. C’est alors que le concert commence. Un, puis deux, puis trois, puis dix oiseaux se mettent à vocaliser ; reconnaître le chant des oiseaux n’a jamais été mon fort. Mais j’avoue que la symphonie est alléchante ; les flûtes, les violons, les hautbois, les harpes, les piccolos s’en donnent à cœur joie. Je savoure ! Les musiciens suivent parfaitement leur partition ; point n’est besoin de chef d’orchestre pour les diriger ; chaque mouvement est exécuté magistralement et sans fausse note. Un vrai délice ! Seule ombre au tableau : on n’entend pas trisser les hirondelles. Toutes les années passées, elles ont répondu à l’appel du printemps. C’est la première fois qu’elles sont muettes ; sans elles, l’orchestre de l’aube est incomplet. Le couple que j’ai vu au mitan du mois d’avril est allé s’installer ailleurs, sans aucun doute.
Mains – Ce sont les miennes ! Elles tentent de saisir un objet, mais leur force de préhension est insuffisante. Ma main gauche est désormais malhabile, faible, inefficace, et la droite n’est guère plus brillante… Elles lâchent ce qu’elles prennent, ce qu’elles désirent ; le cerveau a beau leur commander toute une série de mouvements, elles refusent de les exécuter ; dès qu’elles touchent un objet, un document, on a l’impression que celui-ci s’enfuit, qu’il simule un désaccord et prend de la distance avec l’une de ses ravisseuses ; il recule et recule encore jusqu’à tomber de son perchoir : une étagère ou une table.
Pourtant, comme chez tous les êtres humains, les mains me sont absolument nécessaires ; l’une d’elles est encore assez adroite pour agiter la plume et manier le poème ; pour traduire, analyser et transcrire mes pensées et ainsi glisser élégamment sur une page.
Il y avait très longtemps que je ne m'étais pas penché sur mon blogue ; j'en suis désolé ! Étienne
On peut se sentir vieux à tous les âges de la vie, par rapport à ceux qui naissent ou à ceux qui nous précèdent, dans l’échelle des âges. Plus on avance en âge, plus on a tendance à se comparer aux plus jeunes. À la fin de la vie, la déchéance qui s’impose suffit amplement à occuper l’esprit. On n’a plus pour horizon que cette fuite en avant, à la recherche du temps perdu et des illusions. On analyse anxieusement – quand la pensée l’autorise encore – la situation dans laquelle on s’éteint lamentablement et péniblement. Que va-t-il advenir de moi, se demande le déchu. Dans une certaine mesure, c’est effrayant et déshonorant, cette perte de son identité, cette perte d’autonomie, alors que l’homme, d’un orgueil illimité, se targue d’accomplir des exploits techniques et sportifs extraordinaires, de construire toujours plus haut (immeubles, ponts suspendus,…) et plus grand (navires, avions,…), de fabriquer toujours plus petit (ordinateurs, tablettes, caméras miniatures,…). En revanche, il est bien incapable de mettre en place un système agréable qui permette à l’extrême vieillesse de se passer dans des conditions supportables, sans qu’elle serve de prétexte à l’ouverture de plus en plus de maisons de retraites, d’instituts médicaux et autres mouroirs dans lesquels on dépose de pauvres humains en voie de décomposition.
Voyageur – Les sorties véritables furent rares pour moi depuis le début de l’année : une journée au bord de la mer en l’agréable compagnie d’une nièce – nous avons bénéficié d’un temps exceptionnel, jour béni au milieu d’une période pluvieuse, à la fin du mois d’août ; puis une visite au château de Troissereux à l’occasion des journées du patrimoine, avec un couple d’amis. C’est tout, oui ! Le résumé de mes voyages tient en ces quelques lignes. Je ne m’en plains pas ; compte tenu de mon état de santé et de la désagréable compagnie d’un fauteuil électrique, je n’ai pas tellement envie de m’exiler momentanément hors de mes murs, dans des lieux hostiles où le danger opère. Toutes les formes, les jeux, les couleurs, les parfums, les fééries,…, sont en mon esprit. Il me suffit de secouer ma mémoire assoupie pour que les images en jaillissent, saisissantes de vérité. Même si elles ne sont pas aussi précises et grandioses que dans la réalité, elles sont tout aussi animées et riches que si elles apparaissaient devant mes yeux au détour d’une route, d’un chemin forestier ou d’un sentier de haute falaise. Quand il ne nous est plus loisible d’être un voyageur véritable ou occasionnel, il est nécessaire de se construire ses propres paysages somptueux et ses monuments prestigieux. On devient un artisan du bâtiment, un architecte et un paysagiste. On est un créateur.
du 21 août – Trapéziste – Ce matin à l’aube, une petite araignée descendait le long de l’angle d’un confiturier… rempli de livres, et, excellente trapéziste, elle tricotait sa toile à mi-hauteur entre le sommet et la base du meuble, en même temps qu’elle semblait jouir de sa lente descente, sans doute également rafraîchissante, en cette période de chaleur accablante. J’en avertis mon auxiliaire, laquelle convoqua les juges de son tribunal encéphalique et, en moins de temps qu’il en faut pour l’écrire, le jugement fut prononcé, elle abattit l’aranéide d’un coup de tapette à mouches. Il est curieux de constater que la belle à quatre paires de pattes mourut sous le léger marteau-pilon qui sert à tuer les diptères dont elle se nourrit. Après cette disparition, je m’interrogeai quelques minutes, en prenant mon petit-déjeuner silencieusement, sur l’arsenal impressionnant que les humains réunissent pour détruire les plus faibles, notamment les bêtes minuscules dont les défenses sont souvent conçues pour protéger leur territoire et ainsi pouvoir s’alimenter à peu près convenablement. Nous leur donnons peu de chance de survie ; leur droit à la vie est infime, face à nous. La lutte pour la suprématie de la force et de l’intelligence est terrifiante.