3 – PENSÉE – Chacun de son côté, Marie et Lucien songeaient à leur brève mais enrichissante conversation, et Marie se demandait si elle tiendrait la promesse faite de retourner le lendemain à la séance de signatures. « Quoi ! se disait-elle, c’est vrai que ce garçon courageux a du charme, que sa persévérance déplacée m’intrigue et m’ébahit, mais de là à me fourvoyer pour honorer une promesse inutile et insensée, ah ! non, susurra-t-elle, décidée à ne point donner suite à son élan ». Pourtant l’idée d’y aller faisait doucement son chemin dans son encéphale compliqué, et elle était séduite par le fait de pouvoir apposer à nouveau sa signature au beau milieu d’une page blanche. Lucien, quant à lui, pensait avec un certain émoi à l’élégance discrète de Marie, dont il ne connaissait d’ailleurs que ce prénom. C’est vraiment peu, s’il lui venait à l’esprit de la retrouver dans les rues labyrinthiques de la ville, si elle n’était pas présente au rendez-vous du lendemain. « Qui me dit qu’elle habite ici, pensa-t-il tout haut ? » « Et puis, foin de tout cela, ajouta-t-il, ce n’est qu’une cliente comme une autre, j’en ai des milliers comme elle à mon actif ! ». Et il alla dîner, persuadé qu’il devait mettre un frein au petit tourbillon événementiel qui était en train de lui tournebouler l’âme. (À suivre)
PRIÈRE
Seigneur, ne m'enlevez jamais
la faculté de tant souffrir !
Sans la souffrance, que serais-je ?
Pas tout à fait un Homme ?
Et que deviendraient mes atomes,
- du corps et d'écriture ! -
sans le rire édenté
du cri qui exprime sa crainte ?
Voilà ! tout est dit, il faut braire
sous les brûlures des maux rares
afin d'occuper, paraît-il,
une place honorable aux cimes.
[ États de conscience 2 ]
Bonne lecture, amis. Étienne.